Jean Epstein : Comment bien choisir le jouet de son enfant ? Pour se développer harmonieusement -sur un plan sensoriel, psychologique et moteur- un enfant a besoin de jouer.
D'où l'importance de bien choisir son jouet qui, justement, doit être fonction de son stade de développement. "Et non de son âge", insiste Jean Epstein, psycho-sociologue,
qui nous propose plutôt de tenir compte des trois grandes étapes du développement de l'enfant dans les premières années de sa vie…L'âge : en aucun cas un critère de choix du jouet... Le jouet est un outil au service du développement (sensoriel, psychologique, moteur...) de l'enfant.
"Il l'alimente", précise Jean Epstein, psycho-sociologue.
L'important est donc bien de savoir quels sont ses besoins en fonction de son stade de développement : besoins qui ne sont pas forcément liés à son âge... tant il semble absurde de parler d'une norme.
"Ainsi, développe le spécialiste, prenons
l'exemple d'une famille de trois enfants : une petite de 6 mois, un garçon de 3 ans et la grande sœur de 5 ans. Cette dernière, de par son statut, va mûrir beaucoup plus vite que la "moyenne" et ses jouets seront ceux d'une fillette plus âgée : elle aura des puzzles de "8 ans", par exemple... Quant au garçon du milieu, il va se retrouver "hors statut". N'étant ni le petit le dernier, ni l'aîné, ses jouets iront, selon l'humeur du jour, du hochet de la petite sœur, au puzzle de la grande... correspondant ainsi à ses besoins à la fois de régression et de progression..."
Le choix d'un jouet doit donc être davantage guidé par "la vie" de l'enfant que par son âge puisque c'est bien ses joies, ses peines et ses préoccupations (un divorce, un deuil sont des facteurs à prendre en compte) que l'enfant joue.
Trois phases essentielles de développementPour aider les parents dans le choix des jouets de leur enfant,
Jean Epstein propose donc plutôt de tenir compte des trois grandes étapes de développement de l'enfant dans les premières années de sa vie :
le "moi", le "moi et les autres" et le "moi avec les autres". "
Lors de la première période, explique-t-il, l'enfant apprend à se connaître. Il faut donc favoriser les "jouets miroir" (le magnétophone qui restitue sa voix, par exemple) et ceux qui contribuent au développement de ses sens et de sa motricité. "
Une période qui s'étend globalement de la naissance à la "crise d'angoisse" qui met un terme à la relation fusionnelle avec la mère.
"
Lors de la seconde phase, qui ne peut se faire que si le "moi" est bien affirmé, poursuit le spécialiste, l'enfant va apprendre à partager avec les autres. Au début, cela va se faire dans la "souffrance" car il a peur d'autrui.
Pour l'y aider, il faut qu'il ait à la fois ses jouets ("son" ourson) et des jouets à partager : ballons, legos...
Cette période correspond également à l'apprentissage de la marche : les mains sont libérées et le petit y gagne une jouissance de tout ce qu'il peut attraper... d'où une possessivité extrême !"
Quant à la dernière étape, qui intervient très globalement vers 2 ou 3 ans, elle annonce, chez l'enfant, un réel plaisir de partager (il va devenir friand de jeux de société)... tout en conservant son univers !
"Un bon jouet, avertit Jean Epstein, est celui qui est en cohérence avec les capacités sensori-motrices de l'enfant, de ses goûts, de ses sens "prioritaires" -le toucher ou l'odorat, par exemple- et de son "intelligence", à dominante littéraire ou logique ( notre société ayant tendance, avec les jouets éducatifs, à privilégier cette dernière...).
" Mais il ne doit en aucun cas le décourager ou le mettre en difficulté, car son but suprême est bien de lui apporter du plaisir...
"Attention, enfin, à ne pas saturer l'enfant de jouets mais à privilégier le jeu. Car si le jouet s'inscrit dans le jeu, il ne saurait le remplacer."
Propos recueillis par Lise Bouilly